Construisons l’avenir en tirant des leçons du passé
Cette année, nous célébrons le 8 mars dans un climat d’espoir et de révolte populaire qui règne sur les pays du moyen orient. En Tunisie, Egypte, Lybie,… la masse des opprimés s’est soulevée et défie le vieil ordre établi depuis plusieurs décennies. Par ces révoltes le visage du monde a pris une autre couleur : à la place de démonstrations de forces des réactionnaires, le monde est témoin du soulèvement des peuples éveillés qui veulent prendre leur destin en main.
Cette année, en Iran, nous célébrons le 8 mars dans des conditions particulières : la République Islamique étant de plus en plus prisonnière de ses propres contradictions sans solutions, cherche à s’accrocher au pouvoir en faisant régner un climat de peur par des arrestations et exécutions massives. Dans son ensemble, le régime est conscient de sa fragilité et de son déchirement et sait parfaitement qu’une simple étincelle suffit pour rallumer le feu des manifestations semblables à celles de l’année dernière. Ses dirigeants sont conscients que le destin de Hosni Moubarak et de Ben Ali peut être le leur à chaque instant.
Le 8 mars, nous nous adressons aux femmes dont les droits les plus élémentaires et les libertés sociales ont été bafouées par un gouvernement réactionnaire. Un gouvernement constitué d’un groupe corrompu que dès ses premiers jours a montré sa vraie nature, par le biais d’un ordre de son « Guide Suprême » (Khomeiny), instituant le port obligatoire du voile. En 1979, au premier « 8 mars » après le renversement du régime monarchique, les femmes éveillées et combattantes de génération précédente, ont manifesté, par centaines de milliers, contre ce décret, en scandant : « Nous n’avons pas fait la révolution pour retourner en arrière ». Elles ont envahi les avenues de Téhéran et les salles des universités pendant 5 jours. Une lutte massive et vaste qui a réussi de faire reculer provisoirement les réactionnaires.
Le 8 mars, nous nous adressons aux femmes combattantes qui malgré le règne d’un Etat théocratique et profondément misogyne, (la République Islamique), ne se sont pas inclinées devants ses « lois » et tout en étant écrasées sous les bottes d’un des plus barbares gouvernements de l’histoire, ne se sont pas soumises à ses volontés et ont résisté et lutté par tous les moyens. Nous nous adressons aux femmes de trois générations qui aux premières rangs des cortèges du soulèvement générale de l’année 2009, au risque de leur vie, ont lutté pour se débarrasser de ce régime d’insulte et de humiliation.
Pendant le soulèvement populaire de l’année 2009 et devant les yeux de tous, les femmes iraniennes ont montré une image éblouissante de leur force et de leur radicalisme. La présence massive de femmes de tous âges aux côtés des hommes en lutte, la disparition de différances de genre dans les rangs de millions de manifestants, a semé une panique incroyable parmi les tortionnaires islamiques.
La plus importante faiblesse politique du mouvement des femmes dans le soulèvement de l’année 2009, a été celle dont le mouvement entier en a souffert : pour se débarrasser de ce régime moyenâgeux, la plupart d’entre elles comme la plupart du reste de la population ont mis de l’espoir dans certaines composantes de ce même Etat. Ainsi, pour les changements fondamentaux, malgré leur colère des dirigeants réactionnaires de « Verts », elles ont fait confiance a ces « gens du haut ».
Des illusions sur les différentes ailes des réactionnaires de la classe dirigeante et la confusion sur la place qu’occupent les amis et les ennemis, a bien fragilisé le mouvement. Bien que la fusion de la religion et de l’Etat a conduit à l’esclavage des femmes qui, par conséquent, sont soumises au maximum d’oppression, la direction réactionnaire des « Verts » n’a jamais voulut inclure la séparation de la religion et de l’Etat, qui a été une des revendications des femmes, dans sa propre liste de revendications. La raison en est que, la République Islamique est misogyne par essence et tout changement fondamental vers l’établissement des droits des femmes est équivalent à son renversement. C’est pourquoi les dirigeants des « Verts » s’efforcent, consciemment, d’empêcher l’apparition des revendications qui mettent en cause les lois qui sont contre les droits des femmes.
Un autre point faible du soulèvement de l’année 2009 résidait dans l’inexistence d’une organisation indépendante et révolutionnaire des femmes. Une telle organisation aurait permis de mettre au point et formuler les besoins et les revendications fondamentales des femmes avec la participation de différentes couches sociales (ouvrières, paysannes, femmes au foyer, enseignantes et étudiantes, infirmières etc.). Ainsi en dégageant les perspectives, le mouvement aura pris plus de profondeur, se serais davantage radicalisé et aurait davantage avancé.
Des forces réformistes du genre de « compagne d’un million de signature » et de « convergence des femmes » (qui en cherchant sa part du gâteux s’est empressé d’annoncer sa création dès le début du soulèvement populaire), possédaient une organisation chancelante qui, à cause de leur ligne politique et la présence dans leurs rangs de femmes de « mollahs » et des épouses des « gens du haut » et la coalition avec une des ailes de la classe dirigeante, ne pouvaient que présenter des revendications minimalistes. Elles ne voulaient ni ne pouvaient jouer un rôle positive dans le combat pour l’émancipation des femmes. Par contre, elles ont joué un rôle destructif et ont répandu des illusions, tout en s’efforçant de transformer la force des femmes comme une réserve au service des forces réactionnaires.
Malgré ces faiblesses, le soulèvement contenait d’importants points forts. Tout d’abord, il a mis en évidence un petit coin des capacités révolutionnaires potentielles de la société. Pendant neuf mois l’ordre réactionnaire a été ébranlé et l’enthousiasme révolutionnaire a atteint des niveaux très élevés parmi les masses opprimés d’Iran et forces progressistes du monde entier. La force et la puissance des femmes ont été mises au devant de la scène et il a été démontré qu’aucun changement révolutionnaire de la société ne se fera sans un changement fondamental de la condition des femmes. Le soulèvement a démontré que si le peuple avance avec plus de conscience, une meilleure organisation et une perspective claire et sans illusion, il pourra « déloger l’empereur de sa trône » et construire la société qu’il souhaite.
Transformons le 8 mars en une journée pour hisser le drapeau de « renversement du régime misogyne de la République Islamique »
Transformons le 8 mars en une journée pour présenter de nouveau nos revendications : « la séparation de la religion et de l’Etat, l’abolition de toute les discriminations économiques, politiques, sociales, légales et culturelles à l’encontre des femmes et des autres couches de la société. L’abolition de port obligatoire de voile, la liberté d’expression, d’opinion, d’organisation etc.
Transformons le 8 mars en une journée de solidarité avec les peuples du monde entier, en particulier les peuples en lutte de Tunisie et d’Egypte.
8 mars 2011
« Extrait d’un tract diffusé en Iran par « des autres femmes »
Traduit et imprimé par :
L’Organisation des femmes du 8 mars (Iran-Afghanistan) - Paris
femmes8mars@yahoo.fr / www.8mars.com